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En France, plus de huit millions de personnes adultes sont obèses, soit 17 % de la population. Officiellement reconnue en tant que pathologie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 1998, l’obésité est multi factorielle : alimentation déséquilibrée, sédentarité, fragilité psychosociale, facteurs environnementaux, trauma, susceptibilité familiale….

L’obésité peut être prise en charge et d’excellents résultats sont obtenus aujourd’hui, grâce à la chirurgie bariatrique ou chirurgie de l’obésité, tant en termes de réduction pondérale, que d’amélioration spectaculaire des comorbidités. Outre son effet direct, elle aide également le patient à modifier son comportement alimentaire et à adopter une nouvelle hygiène de vie contribuant au maintien dans le temps de la perte de poids.

Dès 2009, la HAS a émis des recommandations précises concernant la prise en charge chirurgicale de l’obésité (1). Depuis lors, sont parues des guidelines européennes (2) et la Société française (SOFFCO) a récemment publié des recommandations de bonne pratique pour le suivi nutritionnel des patients après chirurgie bariatrique (3).

La prise en charge d’un patient en chirurgie bariatrique implique la participation d’une équipe pluridisciplinaire, en relation avec le médecin traitant.

Pourquoi opérer ?

L’obésité est un facteur de risque de mortalité qui augmente avec l’indice de masse corporelle (IMC). Les complications sont métaboliques et organiques : diabète de type 2, hypertension artérielle (HTA), syndrome d’apnées du sommeil, maladies cardiovasculaires, dyslipidémie, maladie ostéoarticulaire, infertilité, risque accru de cancer, diminution de l’espérance de vie…

Les traitements médicaux n’ont pas prouvé leur efficacité dans le temps, voire, pour certains, sont dangereux. La littérature montre qu’au long cours, la chirurgie a une efficacité supérieure en termes de perte de poids, de régression des comorbidités et d’amélioration de l’espérance de vie, comparée à la prise en charge médicale. De fait, les patients la demandent.

Quelle technique utiliser ?

Les trois interventions bariatriques les plus pratiquées en France sont :

La sleeve gastrectomy (SG) et l’anneau périgastrique ajustable sont des interventions restrictives ; le bypass est une intervention restrictive avec malabsorption.

 

Le choix de l’une ou l’autre d’entre elles dépend de l’origine de l’obésité, des capacités du patient à s’adapter à de nouvelles mesures diététiques, des objectifs de perte pondérale, du patient (âge, niveau éducatif, habitudes de vie…), de ses antécédents médicochirurgicaux, traitements en cours, d’un éventuel désir de grossesse… (4). Fin 2017, la sleeve gastrectomy était deux fois plus pratiquée que le bypass et l’anneau était en nette régression (5). D’autres techniques ont récemment été évaluées par la HAS (5) et certaines d’entre elles sont susceptibles de se diffuser en France : la SADI-sleeve, la bipartition du transit et l’endosleeve.

Ces interventions ne sont pas dénuées de complications à court et long termes. De fait, un suivi clinique et biologique est indispensable.

Qui opérer ?

Les indications chirurgicales de l’obésité chez l’adulte (recommandations de la HAS 2009) sont :

  • Index de masse corporelle (IMC) ≥ 40 kg/m2 ou IMC ≥ 35 kg/m2 avec une comorbidité susceptible d’être améliorée par la chirurgie : hypertension artérielle ou autre maladie cardiovasculaire, syndrome d’apnée du sommeil et autres troubles ventilatoires, diabète de type 2 et autres désordres métaboliques, maladie ostéo-articulaire invalidante, stéatose hépatique non alcoolique ;
  • en 2e intention, après échec d’une prise en charge médicale de 6 à 12 mois bien suivie ;
  • en l’absence de perte de poids suffisante ou de maintien de la perte de poids ;
  • patient bien informé au préalable, ayant bénéficié d’une évaluation et d’une prise en charge pluridisciplinaires, ayant accepté la nécessité d’un suivi médical et chirurgical à long terme,
  • avec un risque opératoire acceptable.

Les contre-indications à la chirurgie bariatrique sont des troubles cognitifs ou mentaux sévères, des troubles du comportement alimentaire sévères ou non stabilisés, une incapacité à un suivi médical prolongé, des addictions, l’absence de prise en charge médicale préalable, une maladie mettant en jeu le pronostic vital à court et moyen terme, la grossesse ou une contre-indication à l’anesthésie générale.

Les non-indications sont un IMC compris entre 30 et 35 kg/m2, un âge > 60 ans (à discuter au cas par cas) et les obésités génétiques ou lésionnelles.

La chirurgie ne permet pas une guérison de l’obésité ; elle consiste à remplacer une maladie métabolique chronique, ayant sa morbi-mortalité spécifique, par une modification du système de la digestion, durable. Un suivi est nécessaire, à vie.

Parcours pré-opératoire du patient

https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2013-03/07r08_info_pat_chirurgie_obesite_parcours_patient.pdf

Bénéfices attendus et complications

 Les bénéfices attendus
Ils sont nombreux et déterminants dans le choix d’une chirurgie bariatrique : perte de poids effective et pérenne, amélioration de la qualité de vie avec une meilleure énergie vitale et un renforcement de la confiance en soi, diminution des comorbidités, augmentation de la fertilité.

Les complications

Les complications digestives
Certaines peuvent être évitées ou minimisées en expliquant bien les règles alimentaires au patient. D’autres sont inhérentes au montage chirurgical : vomissements, troubles du transit, dysphagie, oesophagite, dumping syndrome (malaise après le repas) notamment après bypass gastrique.

Les complications psychologiques et sociales

Les complications chirurgicales

  •  –sleeve et bypass : fistule, sténose, hémorragies, embolies, occlusion, ulcère anastomotique ;
  • bypass : hernie interne dite de Peterson, reflux biliaire en cas de montage en oméga notamment.

Les complications médicales fonctionnelles
Elles sont principalement de deux types : dumping syndrome (après chirurgies malabsorptives de type bypass gastrique) et hypoglycémies.

Les symptômes du dumping syndrome sont post-prandiaux et précoces. La prise d’aliments riches sucrés et/ou gras, hyperosmotiques, entraîne une déshydratation extracellulaire : le patient demande à s’allonger car il ressent des signes vasomoteurs (céphalées, palpitations, flush, pâleur, syncope) et abdominaux (nausées, crampes abdominales, diarrhée, borborygmes).

Les hypoglycémies tardives (1 à 3 h après le repas) surviennent chez 10 à 15 % des patients opérés (hypoglycémies très sévères dans 1 à 2 % des cas). Les patients se présentent avec une sensation de faim, des troubles de conscience, des difficultés de concentration, une transpiration.

Les complications nutritionnelles
L’absorption des micronutriments est altérée après un bypass, essentiellement en raison du court-circuit du duodénum, principal site d’absorption des micronutriments, de l’achlorhydrie et de la diminution du facteur intrinsèque.

Même si la sleeve ne modifie pas la continuité intestinale, elle entraîne également des déficits en micronutriments, du fait de la diminution du facteur intrinsèque et de l’acide chlorhydrique, secondaire à l’ablation d’une grande partie de l’estomac. Le passage très rapide du bol alimentaire dans le duodénum empêche l’absorption convenable des micronutriments.

Le dépistage et le traitement des carences pré-opératoires est important pour minimiser les carences post-opératoires (6).
Pendant la phase de perte de poids, l’apport oral est souvent insuffisant ; le patient a donc besoin d’être supplémenté (7).

Surveillance clinicobiologique des patients avant et après une chirurgie bariatrique

  • vomissements importants, troubles digestifs : vitamine B1 ++,
  • infections : protéines, vitamine D,
  • sécheresse de la peau, dermatite, ecchymoses, pétéchies, alopécie : zinc, fer, protéines, vitamine C,
  • paresthésies, troubles neurologiques, psychiatriques : vitamines du groupe B, zinc, cuivre,
  • anomalies de la vision : vitamine A,
  • saignements : vitamine K.

Il faut essayer de limiter la contraception orale à cause des vomissements qui ne sont pas rares en post-opératoire, surtout après bypass, puisque la biodisponibilité médicamenteuse est moindre. Un projet de grossesse sera au mieux anticipé avec une supplémentation périconceptionnelle. En cas de grossesse, on insistera sur la supplémentation vitaminique.

Les règles fondamentales de l’alimentation au quotidien

  • Repas de petits volumes : 3 repas + 2 collations à vie.
  • Manger des protéines (animales ou végétales) à chaque repas.
  • Commencer le repas par les protéines.
  • Favoriser une prise de protéines à chaque collation.
  • Ne jamais boire en mangeant et respecter un intervalle de temps avant et après la prise alimentaire.
  • Jamais de boissons gazeuses.
  • Prendre le temps de manger, bien mastiquer, poser les couverts entre chaque bouchée.
  • Avant chaque bouchée, demandez-vous si vous avez encore faim.
  • Éviter de manger trop gras, trop salé, trop sucré.
  • S’autoriser des repas plaisir occasionnellement, sans culpabiliser.

Consignes alimentaires du premier mois opératoire
J1 à J15 : consistance « pots de bébé » sans morceaux
J15 à J30 : consistance « pots de bébé » avec morceaux
Faites de l’exercice physique au moins 3 fois par semaine (marche, gym, vélo, danse…), bougez au moins 30 min par jour

Attention au dumping syndrome qui survient à cause d’une ingestion rapide de produits sucrés et gras. Les symptômes les plus courants sont : bouffées de chaleur, sueurs, palpitations, pâleur, tachycardie, douleurs abdominales, diarrhées, nausées… Allongez-vous, hydratez-vous.

Si vous vomissez :

  • Vous avez mangé trop vite
  • Vous avez trop mangé
  • Vous avez mangé de gros morceaux
  • Vous avez bu en mangeant

Dépistage des carences pré- et post-opératoires

Avant l’intervention, l’alimentation du sujet obèse est généralement plus riche en graisses, en produits sucrés et donc à haute densité énergétique et à faible densité nutritionnelle. Ce type d’alimentation est associé à une faible teneur en vitamines, protéines, minéraux et fibres. L’augmentation des apports énergétiques majore les besoins en micronutriments, ce qui accentue le risque de déficit. Les patients obèses sont donc susceptibles de présenter des déficits ou des carences spécifiques. Les plus fréquents sont ceux en vitamines B1, B12, B9, A, C, D et E. Néanmoins, le statut vitaminique ou en micronutriments établi sur les seuls marqueurs sériques est discutable chez le sujet obèse en raison du stockage de certaines vitamines dans le tissu adipeux et d’un volume de distribution différent.

En pratique, le dépistage des principales carences est recommandé en pré-opératoire et lors du suivi. La correction des carences avant l’intervention est très importante pour limiter les complications nutritionnelles post-opératoires ; il importe notamment de corriger la dénutrition protéique avant l’intervention, pour favoriser la cicatrisation.

Une prescription de multivitamines en post opératoire est systématique pendant la phase de perte de poids, mais, souvent, ne suffit pas (3).

Protéines

Les carences en protéines sont fréquentes en pré-opératoire (les obèses sont sarcopéniques) et les 6 premiers mois post-opératoires, notamment si la perte de poids est très rapide et/ou en cas de vomissements ou maladie intercurrente. Plusieurs mécanismes peuvent être incriminés : carences d’apports du fait de la restriction alimentaire et d’un certain dégoût pour les viandes, diminution des secrétions (pancréatiques, pepsinogène…), réduction de la surface d’absorption intestinale (exclusion du duodénum).

Ces carences se manifestent par une perte musculaire, une asthénie, des troubles des phanères. La surveillance repose sur des dosages d’albumine, de préalbumine et de CRP (interprétation de l’albuminémie en fonction de l’état inflammatoire).

Les recommandations en termes d’apport nutritionnel sont au minimum de 60 g de protéines par jour, ce qui est souvent impossible dans les suites opératoires, d’où le recours à des suppléments hyperprotidiques si nécessaire, sous forme liquide ou de poudre (3) ; à associer à 30 minutes de marche par jour, pour limiter la fonte de la masse musculaire.

Fer

Les carences sont fréquentes en pré-opératoire concernant de 0 à 47 % des patients selon les séries (8). En post-opératoire, les patients doivent être systématiquement supplémentés (3).

Les carences en fer post-sleeve s’expliquent par le manque de sécrétion d’acide gastrique, secondaire à la résection et à la prise d’inhibiteurs de la pompe à protons au long cours (9).

Les signes d’appel d’une carence sont principalement une asthénie, une pâleur, une anémie. Son dépistage repose en première intention sur le dosage de la ferritine sérique.

Les recommandations sont une supplémentation orale (100 mg/j) ou par voie IV si la ferritine est < 30 mg/L ou l’hémoglobine < 10 g/dL (300 mg IV à J1 et J3). L’absorption du fer peut être améliorée en administrant conjointement de la vitamine C.

Toutefois, la prise orale de fer au long cours n’est pas dénuée d’inconvénients, pouvant entraîner des troubles digestifs, ainsi que des problèmes d’absorption du manganèse, du chrome et du sélénium (3).

 Folates (acide folique, vitamine B9)

Les carences pré-opératoires sont fréquentes (0 à 63 %) (8).

L’acide folique est absorbé tout au long du tube digestif mais nécessite des sucs pancréatiques ; de fait, il existe des problèmes d’absorption après un bypass. Toutefois, une supplémentation systématique n’est pas nécessaire, les multivitamines suffisent généralement.

Les signes d’appel de carence sont une macrocytose, une hyperhomocystéinémie, une asthénie, une anorexie. Chez la femme enceinte, il existe un risque d’anomalie de fermeture du tube neural du fœtus, d’où la recommandation de supplémenter les femmes en âge de procréer au moins 12 semaines avant la conception, à poursuivre 12 semaines après, à une dose minimale de 5 mg/j (3, 10).

Vitamine B12 (cyanocobalamine)

Les carences pré-opératoires sont relativement fréquentes (0 à 23 %) (8).

La vitamine B12 (cyanocobalamine) est un cofacteur de synthèse de la succinyl coA et de la méthionine, impliquées dans le fonctionnement des cellules nerveuses. Il existe pour la vitamine B12, une réserve hépatique et le stock de vitamine B12 est habituellement suffisant pour 6 à 12 mois.

En post-opératoire, les carences en vitamine B12 s’expliquent par la résection du fundus et le manque de facteur intrinsèque normalement produit pas les cellules pariétales. Or, la vitamine B12, comme l’acide folique, a besoin d’acide gastrique pour être extraite des aliments (9).

Les carences en vitamine B12 se manifestent par une anémie macrocytaire, une dysgueusie, une glossite et des troubles neurologiques qui peuvent être sévères (neuropathie, déclin cognitif précoce) (3, 10).

Après bypass, les recommandations sont d’administrer une dose quotidienne orale, mais le plus simple est une ampoule de 1000 mg /mois en IM, à vie (3). En cas de pullulation microbienne, l’administration se fera par voie IV.

Après sleeve, il n’y a pas de consensus en faveur d’une supplémentation. Celle-ci se fera en fonction des résultats des dosages (3). Il n’y a pas de toxicité en cas de surdosage.

Compte tenu des réserves, il y a peu d’intérêt à un dosage précoce de vitamine B12.

Vitamine D et calcium

Les obèses sont plus souvent carencés en vitamine D (jusqu’à 90 %) que la population générale, en raison de la séquestration de la vitamine D dans la graisse, de la diminution de leur temps d’exposition au soleil, de leur mode de vie sédentaire, et de leur propension à porter des vêtements couvrants.

En post-opératoire, les carences s’expliquent par plusieurs mécanismes : le lactose est mal toléré, pour être absorbé, le calcium a besoin d’acide gastrique, l’absorption se fait majoritairement dans l’intestin grêle proximal, la stéatorrhée post bypass entraîne une déperdition de vitamines liposolubles dont la vitamine D et la baisse de la leptine agit sur le métabolisme osseux.

Ces déficits combinés se traduisent par une élévation de la parathormone (PTH), première anomalie détectable, alors que la calcémie corrigée reste très souvent normale (10). Ainsi, une hyperparathyroïdie est retrouvée en post-opératoire chez 40 % des patients, avec un risque augmenté d’ostéoporose, voire d’ostéomalacie (11).

Les recommandations sont de supplémenter dès que la PTH augmente, par une ampoule de 100 000 UI de vitamine D par mois, associée à 1 g de calcium, deux fois par jour ; privilégier le citrate de calcium (meilleur biodisponibilité). Il importe également de surveiller l’ostéoporose chirurgicalement induite par une ostéodensitométrie régulière après bypass (3, 10).

Vitamine B1 (thiamine)

La vitamine B1 est une vitamine hydrosoluble impliquée dans la transmission nerveuse et est un cofacteur de nombreuses enzymes du métabolisme du glucose. Son stock dans l’organisme est faible et peut s’effondrer en 3 à 6 semaines ; un facteur de risque important est la consommation d’alcool dont l’absorption est en compétition au niveau du jéjunum proximal et qui doit être totalement proscrit a minima les 6 premiers mois suivant une chirurgie bariatrique. Les carences post-opératoires sont très fréquentes, jusqu’à 49 % dans la littérature (12). Les complications liées aux carences surviennent tôt, après tout type de chirurgie :

  • encéphalopathie de Gayet-Wernicke (en aigu) : confusion, troubles oculomoteurs (nystagmus ou paralysie oculomotrice), syndrome cérébelleux ;
  • encéphalopathie de Korsakoff (en chronique) : amnésie antérograde, anosognosie, fausses reconnaissances et fabulations ;
  • neuropathie périphérique : « béri-béri » neurologique (polyneuropathie sensitive, motrice, douloureuse, distale, symétrique).

La diminution de la concentration sérique de vitamine B1/thiamine n’est pas constante ; parfois, la carence peut être mise en évidence par une diminution de la thiamine érythrocytaire et/ou de l’activité transcétolasique érythrocytaire.

Une substitution à raison de 100 mg/j par voie orale est généralement suffisante (3). En cas de suspicion d’encéphalopathie de Gayet Wernicke, est préconisée une dose de 500 mg 3 fois/j en  IV pendant 3 jours, associée à du magnésium (cofacteur enzymatique), puis 250 mg/j pendant 5 jours.

En cas de vomissements, il est recommandé de supplémenter en vitamine B1 par 100 mg/j administrés en IV immédiatement (ne jamais associer de sérum glucosé), quel que soit le résultat d’éventuels dosages. Il n’y a pas de toxicité en cas d’hypervitaminose B1.

Zinc

Un déficit en zinc survient chez près d’un patient sur deux un an après bypass et chez un patient sur quatre après sleeve. Il peut être évoqué devant une anorexie, une hyposmie/agueusie, une perte de cheveux ou un eczéma, voire dans les formes plus graves, par des troubles mentaux ou des lésions cutanées sévères. Une substitution orale par 15 à 30 mg/j de zinc est indiquée en cas de carence, mais il convient d’être attentif au problème d’interférence d’absorption en cas de prise concomitante de fer. Il est conseillé de prendre le zinc à distance de la prise d’autres compléments et de toujours associer 1 mg de cuivre pour 10 mg de zinc (cf.infra).

Vitamines AEK

Les carences en ces vitamines liposolubles sont assez rares.

Les carences en vitamine A entraînent des troubles visuels, une diminution de la fertilité masculine et des anomalies fœtales (doser la beta HCG avant de donner de la vitamine A). Les recommandations sont une administration de 50 000 UI/semaine (3).

Les carences en vitamine E peuvent être à l’origine de neuropathie périphérique, d’une faiblesse musculaire, d’une ataxie ; supplémenter par 400 UI/J (3).

Les carences en vitamine K sont responsables de troubles de la coagulation ; à supplémenter par 2 mg/semaine.

Toutefois, ces déficits sont rares ; les dosages de ces vitamines peuvent n’être réalisés qu’une fois par an, après chirurgie malabsorptive.

 

Cuivre

Les suppléments multivitaminiques contiennent généralement assez de cuivre pour prévenir les carences, rares après chirurgie bariatrique, mais il faut y penser devant une anémie ne répondant pas à la supplémentation en fer, en particulier chez les patients substitués en zinc (dont l’absorption interfère avec celle du cuivre). Ce déficit peut aussi être évoqué devant des troubles visuels ou neurologiques. En cas de symptôme, une supplémentation orale par 3 à 5 mg/j de cuivre est indiquée (3).

Rythme de la surveillance biologique

Propositions de bilans systématiques pré- et post-opératoires

 En pré-opératoire : albumine, hémoglobine (NFS), ferritine et coefficient de saturation de la transferrine (CS), calcémie, 25OH-vitamine D, vitamines B1, B9, B12 (recommandations HAS).

Ce bilan peut être complété par : glycémie à jeun, HbA1c, peptide C, exploration d’une anomalie lipidique (EAL), ionogramme sanguin, vitamine A, vitamine B9 érythrocytaire, magnésium, phosphates, TSH, albumine et pré-albumine, bilan hépatique, CRPus.

En post-opératoire (d’après 3, 13) peut être proposé le schéma de surveillance suivant :

3 mois6 mois1 an18 mois1 fois/an
Ionogramme, glycémie, transaminases, NFSXXXXX
FerritineXXXX
Vitamine B12XXX
Folates sériques + erythrocytairesXXXXX
Calcium + 25 OH vitDXXXXX
PTHXXX
Si suspicion clinique de carence :

Vitamines A, E, K

 

X
Albumine, pré-albumineXXXXX
Zinc, sélénium, magnésiumXXX

Si anémie inexpliquée, rechercher un déficit en cuivre.
Si perte de cheveux : doser ferritine, protéines, zinc, vitamines B.
Bilan à compléter, selon les comorbidités, situations cliniques, … : HBA1c, bilan martial complet, sélénium, vitamine C, …

CONCLUSION

Il importe de dépister et traiter toute carence en vitamine ou oligoéléments en pré-opératoire, ainsi qu’en post-opératoire. Cette surveillance est indispensable pour prévenir les complications et adapter la prise en charge. Les traitements des co-morbidités devront également être réajustés. Dans tous les cas, l’activité physique doit être encouragée, voire systématisée.

 

BIBLIOGRAPHIE

(1) Busetto L, Dicker D, Azran C, et al. Practical Recommendations of the Obesity Management Task Force of the European Association for the Study of Obesity for the Post-Bariatric Surgery Medical Management. Obes Facts. 2018 Feb; 10(6): 597–632.

(2) HAS. Obésité : prise en charge chirurgicale chez l’adulte. Janvier 2009.

https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2011-12/recommandation_obesite_-_prise_en_charge_chirurgicale_chez_ladulte.pdf

(3) Quillot D, et al. Recommendations for nutritional care after bariatric surgery: Recommendations for best practice and SOFFCO-MM/AFERO/SFNCM/expert consensus. Journal of Visceral Surgery 2020 ;158 : 51-61.

(4) Tarrerias AL. Suivi après chirurgie bariatrique. Ateliers POST’U 2015. https://www.fmcgastro.org/textes-postus/postu-2015/suivi-apres-chirurgie-bariatrique/

(5) HAS Synthèse. Nouvelles techniques de chirurgie bariatrique : identification, état d’avancement et opportunité d’évaluer. Validée par le Collège le 10 septembre 2020.

(6) Parrott J, Frank L, Rabena R, Craggs-Dino L, Isom KA, Greiman L. American Society for Metabolic and Bariatric Surgery integrated health nutritional guidelines for the surgical weight loss patient 2016 update: micronutrients. Surg Obes Relat Dis. 2017(13):727-741.

(7) Kanerva N, Larsson I, Peltonen M, Lindroos A.-K,  Carlsson L.M. Changes in total energy intake and macronutrient composition after bariatric surgery predict long-term weight outcome: findings from the Swedish Obese Subjects (SOS) study. Am J Clin Nutr, 106 (2017), pp. 136-145, 10.3945/ajcn.116.149112

(8) O’Kanel M, Paretti HM, Pinkney J, et al, British Obesity and Metabolic Surgery Society Guidelines on perioperative and postoperative biochemical monitoring and micronutrient replacement for patients undergoing bariatric surgery—2020 update.

(9) Gillon, S.; Jeanes, Y.M.; Andersen, J.R.; Våge, V. Micronutrient Status in Morbidly Obese Patients Prior to Laparoscopic Sleeve Gastrectomy and Micronutrient Changes 5 years Post-surgery. Obes. Surg. 2016, 27, 606–612.)

(10) Favre L, Ferrario C, Mantziari S, Suter M. Recommandations de suivi des carences nutritionnelles après chirurgie bariatrique. Rev Med Suisse 2019; 15 : 626-30.

(11) Damms-Machado, A.; Friedrich, A.; Kramer, K.M.; Stingel, K.; Meile, T.; Küper, M.A.; Königsrainer, A.; Bischoff, S.C. Pre- and Postoperative Nutritional Deficiencies in Obese Patients Undergoing Laparoscopic Sleeve Gastrectomy. Obes. Surg. 2012; 22:881–889.

(12) Tang L, Alsulaim HA,  Canner J.K, Prokopowicz GP, Steele KE. Prevalence and predictors of postoperative thiamine deficiency after vertical sleeve gastrectomy. Surg Obes Relat Dis, 14 (2018), pp. 943-950, 10.1016/j.soard.2018.03.024).

(13) Quillot D. Prévention et traitement des carences en vitamines, minéraux et oligoéléments après chirurgie de l’obésité. La lettre de l’hépato-gastroentérologue 2010 ;XIII :4-5.

 

ANNEXES

 

RECOMMANDATIONS HAS 2009

https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2011-12/recommandation_obesite_-_prise_en_charge_chirurgicale_chez_ladulte.pdf

BROCHURE HAS DU PATIENT

https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2009-09/brochure_obesite_patient_220909.pdf

ARTICLE DE LA SOFFCO

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33436155/

Ordonnance type post opératoire

  1. un inhibiteur de la pompe à protons
  2. un « fluidifiant biliaire » type acide ursodésoxycholique
  3. Les vitamines

Le plus important est de prendre quotidiennement une multivitamine de votre choix.


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