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La pré-éclampsie (PE) est une pathologie dont l’étiologie est multifactorielle. En France, elle concerne environ 24 000 patientes/ 800 000 grossesses par an, ce qui représente 1 à 3 % des grossesses chez les nullipares et 0,5 à 1,5 % chez les multipares (Goffinet, 2010).
La morbi-mortalité maternelle et fœtale associée est élevée : il s’agit de la 2e cause de décès maternels en France après les hémorragies de la délivrance, et d’une cause majeure de retard de croissance intra-utérin (RCIU). Elle est aussi à l’origine d’1/3 des naissances de grands prématurés. En outre, la PE entraîne des complications à long terme : les femmes ayant eu une pré-éclampsie ont un risque fortement accru de morbi-mortalité cardiovasculaire.

La définition de la PE est essentiellement clinique : tension artérielle ≥ 140 mm Hg et/ou diastolique ≥ 90 mm Hg associée à une protéinurie ≥ 0,3 g/24 h survenant après 20 semaines de grossesse ; la présence d’œdèmes est classique, mais non discriminante. La PE se développe dès le premier trimestre de la grossesse, mais les symptômes n’apparaissent qu’au 3e trimestre. Les complications des PE sont :

  • maternelles : poussée hypertensive sévère imposant l’interruption de grossesse, HELLP syndrome, éclampsie, hématome rétroplacentaire, insuffisance rénale aiguë,…
  • fœtales : RCIU, mort fœtale in utero (MFIU), prématurité.

La moitié environ des PE se manifestent avant 34 SA (semaines d’aménorrhée), elles sont dites précoces ; l’autre moitié, au-delà de 34 SA (PE tardives). Les PE précoces sont les plus redoutées car elles sont associées à une prématurité iatrogène ou ont un retentissement fœtal important.

Le dépistage de la PE est un calcul de risque prenant en compte les facteurs de risque recueillis par l’interrogatoire et l’examen clinique, les mesures biophysiques (tension artérielle, échographie du 1er trimestre avec mesure de la longueur crânio-caudale, index de pulsatilité à l’écho-doppler des artères utérines), et les marqueurs biologiques (PAPP-A et PlGF). Les concentrations sériques de PlGF permettent également de préciser le risque de RCIU isolé et d’adapter la surveillance échographique en ciblant mieux les patientes à risque. Les RCIU non diagnostiqués représentent la 1ère cause de mort fœtale in utero évitable (Roux-Terrier et al, 2014).

L’intérêt d’un dépistage précoce de la PE réside dans la possibilité d’instaurer une prophylaxie par aspirine. Bujold et al (2014) ont en effet montré que l’aspirine avait un effet préventif efficace sur la pré-éclampsie uniquement lorsque que le traitement était mis en place avant la 16e semaine de grossesse. L’étude prospective multicentrique en double aveugle ASPRE  (Rolnick et al, 2017) souligne l’intérêt de ce dépistage pour traiter de façon précoce par aspirine (150mg/j) les patientes à risque de PE et diminuer ainsi significativement la survenue d’une pré-éclampsie avant 37 SA.

Calcul de risque de pré-éclampsie

Le calcul de risque est effectué au laboratoire par un logiciel de calcul adapté aux réactifs et fonctionnant sur le même principe que celui du logiciel de calcul de risque de T21. Les facteurs de risque cliniques, biophysiques et biologiques ont été établis à partir d’une cohorte de femmes enceintes dont certaines ont développé une pré-éclampsie et d’autres non.

Renseignements cliniques pris en compte dans le calcul :
  • IMC : l’obésité est un facteur de risque de PE,
  • Origine géographique : le risque de PE est augmenté chez les femmes originaires d’Afrique subsaharienne et des Antilles,
  • Parité : la nulliparité est un facteur de risque de PE,
  • Antécédent personnel ou familial de PE,
  • Hypertension chronique (traitée ou non),
  • Tabac : un tabagisme actif diminue le risque de PE.
Mesures biophysiques :
  • Pression artérielle : mesurée entre 11+0 SA et 13+6 SA, idéalement bi-bras (sinon un seul bras), permettant le calcul de la Pression Artérielle Moyenne (PAM) à partir des pressions systoliques et diastoliques. La PAM a en effet une valeur prédictive positive de pré-éclampsie plus élevée que la simple mesure de la pression artérielle (Poon et al, 2012). Le calcul est effectué par le logiciel, puis exprimé en MoM (Multiple de la Médiane) en tenant compte du poids de la patiente.
  • Doppler des artères utérines : index de pulsatilité (IP).
Marqueurs biochimiques :
  • PAPP-A (Pregnancy-Associated Growth Factor) : métalloprotéase, jouant un rôle important dans l’invasion trophoblastique. C’est également un marqueur sérique maternel du calcul risque combiné de T21 fœtale. Une faible concentration sérique en PAPP-A évoque un risque de T21, de trisomie 18, de pré-éclampsie, de RCIU et/ou de fausse-couche spontanée (PAPP-A et hCGß basses).
  • PlGF (Placental Growth Factor), produit par le placenta, est un médiateur de l’angiogenèse, appartenant à la famille des facteurs de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF). Chez les patientes qui développeront une pré-éclampsie, la concentration sérique de PlGF est inférieure à celle des patientes non atteintes. Il pourrait également avoir un intérêt pour prédire les RCIU vasculaires et peut-être la prématurité.

Les dosages sont réalisés sur un prélèvement sanguin effectué entre 11+0 SA et 13+6 SA (comme pour le dépistage combiné, au 1er trimestre, de la trisomie 21 fœtale).
Les performances sont meilleures pour le dépistage des PE précoces (les plus « redoutées »). La combinaison des dosages sériques et des renseignements cliniques permettrait de dépister 93 % des PE précoces (avec environ 5 % de faux positifs) ; en y ajoutant les marqueurs biophysiques, le taux de détection est de 96,3 % (Akolekar et al, 2013).


 

Bibliographie


Pour en savoir plus


Article mis à jour en Août 2017