Lumière sur
Tous les « Lumière sur »Les pathologies de la corticosurrénale sont rares, mais potentiellement graves. Le diagnostic d’une insuffisance surrénalienne ou d’un syndrome de Cushing repose en première intention sur des dosages statiques de cortisol et des tests dynamiques simples, permettant d’évaluer la sécrétion cortisolique.
Explorations de première intention de l’axe corticotrope
Lorsque l’on suspecte une insuffisance corticosurrénalienne (IS) ou un syndrome de Cushing, les dosages à réaliser sont les suivants :
- Cortisolémie : l’activité de l’axe corticotrope est très sensible au rythme circadien et au stress ; de fait, les dosages de cortisol de base sont à interpréter en fonction des horaires de prélèvement et du rythme de vie du patient.
La cortisolémie doit être dosée en basal à 8 h du matin, ou stimulée, à 9 h, après injection de Synacthène®, ou encore freinée, à 8 h, après dexaméthasone (DXM) 1 mg à minuit. - Cortisol salivaire : à minuit (24 h) (hors nomenclature) ;
- Cortisolurie des 24 h : ce dosage a peu d’intérêt pour le diagnostic d’IS car il existe un recouvrement important des valeurs entre sujets sains et sujets en IS ; il est en revanche pertinent pour le diagnostic de syndrome de Cushing.
Diagnostiquer une insuffisance surrénalienne
L’insuffisance surrénalienne (IS) est une pathologie rare (1/10 000 habitants) mais potentiellement grave, en raison du risque de décompensation en IS aiguë, létale en l’absence de traitement rapide et adapté. L’insuffisance surrénalienne chronique est probablement sous-estimée, notamment dans sa forme secondaire à une corticothérapie prolongée. Or, sa prise en charge permet d’éviter le risque de complication en IS aiguë et d’améliorer la qualité de vie des patients. D’où l’intérêt d’en poser le diagnostic.
Evoquer le diagnostic d’insuffisance surrénalienne chronique
Le diagnostic d’IS chronique est évoqué devant des symptômes invalidants dont le principal est l’asthénie, souvent associée à un amaigrissement, une anorexie, des nausées, des douleurs abdominales… Les risques sont réels : IS aiguë, hypotension artérielle, collapsus (déshydratation), hyponatrémie / hyperkalimie, hypoglycémie.
Confirmer le diagnostic d’insuffisance surrénalienne par la biologie
Le diagnostic biologique repose sur des dosages de cortisol basal à 8h, et, le cas échéant, après stimulation par Synacthène®. Les dosages associés d’ACTH, voire d’aldostérone et de rénine, permettent d’orienter l’enquête étiologique.
Nous mettons à votre disposition un logigramme d’aide au diagnostic.
Etiologies de l’insuffisance surrénalienne
L’IS peut être d’origine surrénalienne, périphérique (IS primaire par destruction de la glande surrénale) : c’est la maladie d’Addison. Le déficit touche alors tous les stéroïdes surrénaliens : cortisol, androgènes, minéralocorticoïdes.
Ou bien elle peut être secondaire (d’origine centrale) : le déficit concerne les glucocorticoïdes et les androgènes ; les minéralocorticoides sont préservés.
Tableau 1 : Distinguer l’insuffisance surrénalienne périphérique dont l’origine est la glande surrénale (= maladie d’Addison) et l’insuffisance surrénale haute ou centrale, dont l’origine est hypophysaire
IS périphérique = maladie d’Addison | IS centrale ou haute (hypophysaire) | |
Principaux signes cliniques | Asthénie Mélanodermie (hyperpigmentation) Anorexie, perte de poids Hypotension, hypotension orthostatique Nausées Syndrome dépressif Aménorrhée, dépilation axillaire et pubienne chez la femme | Asthénie Teint pâle
Baisse tensionnelle et troubles digestifs moins marqués que dans la maladie d’Addison
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Signes biologiques | Cortisol et aldostérone diminués ACTH élevée Rénine élevée Hyponatrémie/hyperkaliémie Hypernatriurèse (perte de sel) SDHEA diminué Hypoglycémie (rare) Parfois anémie normochrome, normocytaire, leucopénie, éosinophilie | Cortisol diminué ; aldostérone normale ACTH normale ou basseHyponatrémie due à une augmentation de la sécrétion d’ADH (dilution) ; kaliémie le plus souvent normale Hypoglycémie |
Causes | Auto-immune Infections : tuberculose, VIH, CMV Maladies infiltratives : sarcoïdose, amylose Médicaments : anticortisolique de synthèse (mitotane : Lysodren®), kétoconazole Surrénalectomie bilatérale Génétiques (hypertrophie congénitale des surrénales,…) Vasculaires Tumorales | Corticothérapie (+++) Tumeurs hypothalamo-hypophysaires Hypophysite Syndrome de Sheehan Traumatisme/chirurgie Maladies infiltratives Radiothérapie Génétiques
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Pathologies associées | Maladie auto-immune : thyroïdite de Hashimoto, vitiligo,… Infection : tuberculose | Insuffisance hypophysaire associée : hypothyroïdie centrale, hypogonadisme, diabète insipide… |
Diagnostiquer un Syndrome de Cushing
Le syndrome de Cushing correspond à l’ensemble des manifestations cliniques dues à une exposition prolongée à un excès de glucocorticoïdes.
Evoquer le diagnostic de syndrome de Cushing
Un protocole national de diagnostic et de soin, publié par l’HAS en 2008, précise qu’il convient d’explorer à la recherche d’un syndrome de Cushing devant :
- des signes évocateurs : une prise de poids, en particulier une surcharge faciotronculaire et une bouffissure du visage. Les signes fréquemment associés sont une diminution de la libido, des signes d’hypercatabolisme (une peau fine et fragile, des ecchymoses, une faiblesse musculaire liée à l’amyotrophie, des troubles des règles, une hypertension artérielle, un hirsutisme, une dépression ou une labilité émotionnelle… ;
- une maladie atypique pour l’âge ou en l’absence de cause évidente : diabète, hypertension artérielle, ostéoporose, trouble psychologique… ;
- un incidentalome surrénalien ;
- un ralentissement de la croissance chez l’enfant avec prise de poids et pseudopuberté précoce.
Stratégie diagnostique du syndrome de Cushing
Le syndrome de Cushing peut être :
- ACTH-dépendant (75 à 80 % des cas) : maladie de Cushing (65-70 % des cas ; 3 femmes pour un homme) ou sécrétion ectopique d’ACTH (tumeur non hypophysaire sécrétant de l’ACTH : 10 % des cas) ;
- ACTH-indépendant (20-25 % des cas) : tumeur unilatérale (adénome, corticosurrénalome) ou, dans 1 à 2 % des cas, une tumeur bénigne bilatérale des surrénales (hyperplasie macronodulaire ou dysplasie micronodulaire pigmentée).
Biais d’interprétation
Il est utile de répéter les premiers examens si les résultats sont limites ou peu concordants avec la clinique.
NB : le test de freinage n’est pas totalement spécifique. Son seuil diagnostique est > 50 nmol/l, mais environ 10 % des sujets entre 50 et 150 nmol/l sont des « faux positifs ».
Une analyse clinique est nécessaire pour appréhender la probabilité de l’IS ou du syndrome de Cushing et les pièges possibles (diagnostics différentiels, biais prévisibles dans les explorations biologiques). Des explorations simples et pertinentes suffisent en première intention (statique +/- dynamique : Synacthène®, dexaméthasone).