Maladie à tiques : La borréliose de Lyme | Eurofins Biomnis

La borréliose de Lyme est l’infection par piqûre la plus commune en Europe. Elle est caractérisée par un grand polymorphisme clinique, mais également bactériologique et antigénique.

La borréliose de Lyme est une infection bactérienne non contagieuse, due à un spirochète, Borrelia burgdorferi sensu lato, transmise à l’homme par la piqûre d’une tique Ixodes. La maladie est présente là où existe son agent vecteur : en Europe (Ixodes ricinus), aux USA et en Amérique centrale (I. scapularis), en Asie (I. persulcatis) et dans l’ouest des USA (I. pacificus).

Ixodes vit en zones humides et forêts de feuillus. Son activité est maximale au printemps et au début de l’automne. L’homme est un hôte accidentel. La bactérie est présente dans l’intestin de la tique, fixée par une protéine OSP A. Elle est transmise après passage dans les glandes salivaires, puis la bactérie diffuse à travers la peau. Les espèces de Borrelia rencontrées en pathologie humaine sont B. afzelii (principale espèce en France), B. burgdorferi (majoritaire aux USA) et B. garinii.

Le taux d’infestation des tiques par Borrelia est de 3 à 30 %, avec de grandes disparités régionales. Après piqûre par une tique infectée, le risque de transmission (séroconversion) est de 10 %.

Diagnostic

Le diagnostic repose sur un faisceau d’arguments incluant le risque d’exposition, la clinique, la biologie.

– Risque d’exposition 

L’absence de souvenir de piqûre ne suffit pas à éliminer le diagnostic. La population à risque inclut les professionnels de la forêt, mais aussi de plus en plus les amateurs de loisirs extérieurs, jardiniers, campeurs, chasseurs, marcheurs. Les régions à risque sont principalement l’Alsace lorraine (+++) et le Limousin ; la période à risque, d’avril à octobre-novembre.

– Clinique
Les manifestations touchent principalement la peau, le système nerveux et les articulations et évoluent en 3 phases

* Forme localisée précoce : l’érythème migrant (EM)

* Formes disséminées précoces de la borréliose de Lyme (< 6 mois après l’apparition des premiers symptômes) : EM à localisation multiple, lymphocytome borrélien, atteintes neurologiques précoces, formes articulaires, cardiaques et ophtalmologiques

* Formes disséminées tardives de la borréliose de Lyme (> 6 mois après l’apparition des premiers symptômes) : acrodermatite chronique atrophiante (ACA), atteintes neurologiques tardives, troubles psychiatriques

La majorité des infections (92 à 95 %) évoluent sur un mode abortif (simple séroconversion). Dans 5 à 8 % des cas, survient une maladie, qui est une infection localisée (érythème migrant ou EM) dans 85 % des cas, et une infection disséminée dans 15 % des cas. Ces dernières guérissent spontanément dans 99 % des cas ; elles se transforment en manifestations chroniques dans moins de 0,5 % des cas.

L’érythème migrant (EM) est pathognomonique de la borréliose, mais il n’est rapporté que dans 50 à 60 % des cas. Il apparaît sur les zones exposées, au site de la piqûre, entre 3 et 30 jours après celle-ci ; sa croissance est annulaire, centrifuge et il n’est pas douloureux. Il persiste 3 à 5 semaines et disparaît spontanément.

Les manifestations disséminées sont des neuroborrélioses dans 48 % des cas et des arthrites dans 27 % des cas, les autres manifestations étant plus rares (acrodermatites atrophiantes ou ACA, atteintes cardiaques, atteintes ophtalmologiques).

Epidémiologie

L’incidence de la borréliose de Lyme en France était estimée à 71 cas pour 100 000 habitants en 2021 (Santé Publique France 2022).

Diagnostic biologique

Diagnostic biologique indirect : la sérologie

Les IgM apparaissent en 3 à 5 semaines, les IgG, en 6 à 8 semaines. En cas de traitement précoce, les IgM et IgG peuvent diminuer, voire ne jamais être détectées. Une fois apparues, les IgM peuvent persister longtemps après un traitement précoce.

La sérologie s’effectue en deux temps : test de dépistage, puis test de confirmation, uniquement en cas de dépistage positif. Il importe de rappeler que la sérologie n’est pas indiquée en phase précoce de l’infection (cf. infra).

La technique utilisée en première intention est une technique ELISA dont l’objectif est d’avoir une sensibilité « maximale », au « détriment » de la spécificité. Si l’ELISA est (+) ou (±), une technique de confirmation (Western-blot/immuno-blot/dot-blot) sera utilisée pour améliorer la spécificité, car des réactions croisées sont fréquentes, avec d’autres agents infectieux (spirochètes ou infections virales) et des pathologies dysimmunitaires.

Concernant la sérologie Borrelia, les normes européennes recommandées sont une spécificité minimale de 90 % en ELISA et de 95 % en Western blot.

Diagnostic biologique direct

L’examen direct est inadapté (sauf en cas de fièvres récurrentes), en raison de la rareté des spirochètes, qui sont intra-tissulaires.

La culture, lente (2 à 8 semaines) et nécessitant des milieux spécifiques, est réservée à des laboratoires spécialisés. Sa sensibilité baisse avec l’évolution de la maladie : voisine de 50 % à partir d’EM, elle n’est que d’environ 20 % pour les ACA, de 3 à 17 % à partir de LCR et < 1 % pour les arthrites.

La recherche directe par PCR (PCR Borrelia burgdorferi sensu lato) présente l’avantage d’une bonne sensibilité sur lésions cutanées (EM et ACA : 50-80 %) et sur liquide synovial (60-80 %). En revanche, sa sensibilité est très décevante dans le LCR (< 10 % à 30 %, sauf dans les premières semaines de la neuroborréliose) et quasi nulle dans le sang. De plus, sa positivité ne signe pas forcément une infection active (La PCR peut rester positive malgré une évolution favorable sous antibiothérapie).

En pratique, c’est la sérologie qui est le plus souvent utilisée.

Limites des tests sérologiques

IgM et infection active ?
La positivité des IgM ne signe pas toujours une infection active : elles ne sont positives que dans 10 à 15 % des ACA dont la culture est positive. Ainsi, dans les ACA, il n’y a pas de corrélation entre IgM positives et PCR ou culture positives. Il en est de même dans les arthrites de Lyme (des IgG positives isolées sont observées dans 90 % des cas) ou les manifestations disséminées tardives.

In fine, les IgM ne sont intéressantes que pour le diagnostic de neuroborréliose aiguë débutante.

 

Une sérologie positive n’équivaut pas à un sérodiagnostic
Une sérologie positive indique simplement un contact avec Borrelia. Ainsi, un suivi pendant 7 ans de sujets infectés par Borrelia asymptomatiques a montré que 95 à 98 % des patients ne développaient aucun anticorps en rapport avec Borrelia (Gern L, 2006).

 

La persistance des Ac ne correspond pas à une persistance de l’infection
Après un traitement bien conduit et efficace, les Ac (IgG et IgM) persistent plus de 10 ans, d’où un risque de retraitement par excès. Les patients doivent donc être suivis cliniquement.

 

Patients séronégatifs atteints de la maladie ?
Il existe un décalage réel entre le début de l’infection et l’apparition des anticorps.

Au stade d’EM, environ 50 % des patients sont séronégatifs. C’est pourquoi la sérologie n’est pas recommandée à ce stade, car elle peut conduire à un rejet diagnostique erroné.

 

Dans les ACA, la sensibilité des IgG ou des Ig totales est de 98 – 99 % et la spécificité des IgG de 97 %. Selon l’expérience du CNR, sur tous les cas confirmés d’ACA (n=24) aux plans clinique, histologique et bactériologique (culture/PCR positive), la sérologie était positive dans tous les cas.

Il en est de même dans les arthrites de Lyme : sur 48 patients avec arthrite PCR+, les 36 cas pour lesquels la sérologie était disponible étaient tous positifs.

 

Dans les neuroborrélioses, la sensibilité de la sérologie dans le sérum n’est « que » de 81 % (75 à 95 % des cas selon le kit utilisé, dans les neuroborrélioses débutantes). De fait, il est recommandé d’analyser conjointement le sérum et le LCR (toutefois, la sérologie Borrelia dans le LCR peut être négative au stade très précoce de la neuroborréliose). La ponction lombaire permet également d’analyser la réaction cellulaire (lymphocytaire dans les neuroborrélioses, avec une hyperprotéinorachie modérée) et de déterminer la synthèse intrathécale d’IgG anti-Borrelia.

Méthodes de confirmation de la sérologie

L’immuno-empreinte (immunoblot) est une méthode de confirmation indiquée lorsque la technique sérologique de première intention est positive ou douteuse. Mais elle n’est pas plus sensible que l’ELISA.

Elle n’est pas indiquée si l’ELISA est négatif. Il n’existe pas de marqueur d’infection active à ce jour (ELISA ou immunoblot).

Stratégie de diagnostic biologique : recommandations de bonnes pratiques

Au stade de forme localisée précoce

Le diagnostic est clinique. Il est recommandé de ne pas faire de sérologie, ni de PCR sur le sang ou les urines.

Au stade de formes disséminées précoces

– Erythème migrant à localisation multiple : le diagnostic est clinique, reposant sur l’aspect des lésions et la notion de leur extension progressive centrifuge. La sérologie n’est pas recommandée.

– Lymphocytome borrélien : la sérologie est recommandée dans le sang : ELISA suivie d’un Western blot si elle est positive ou douteuse. NB : la sérologie peut être négative (dans 10 % des cas). En cas de suspicion clinique forte, un contrôle de la sérologie 3 semaines plus tard peut être utile.

– Atteintes neurologiques précoces, périphérique ou centrales : un avis neurologique spécialisé en urgence est justifié. La sérologie est recommandée dans le sang : ELISA suivie d’un Western blot si elle est positive ou douteuse. Mais elle peut être négative. L’analyse du liquide cérébro-spinal (LCS) est recommandée (cytologie, biochimie et sérologie dans le LCS avec calcul de l’index Ac comparatif sang/LCS)

La présence d’une méningite lymphocytaire et d’une hyperprotéinorachie évoque le diagnostic de borréliose de Lyme mais n’est pas spécifique ; la positivité de l’index Ac confirme le diagnostic. En phase précoce, ces tests peuvent être négatifs, mais leur négativité répétée dans le temps doit conduire à évoquer d’autres diagnostics.

Chez l’enfant, en cas de paralysie faciale isolée et unilatérale, sans notion d’EM ni de signe méningé, seule la sérologie sanguine est recommandée dans un premier temps. Si elle est positive, une ponction lombaire sera réalisée dans un deuxième temps, à la recherche d’une réaction méningée. Si la sérologie sanguine est négative, une sérologie sanguine de contrôle est recommandée à 3 semaines, suivie d’une ponction lombaire si la sérologie de contrôle est positive.

– Atteintes articulaires : un avis rhumatologique est recommandé.

En cas de mono ou oligoarthrite survenant dans les 6 mois suivant une piqûre de tique, une sérologie est recommandée dans le sang (ELISA suivie d’un Western blot si elle est positive ou douteuse) associée si besoin à une PCR sur le liquide articulaire.

Le diagnostic est évoqué si : sérologie sanguine positive et PCR négative ou sérologie sanguine positive et PCR non réalisée ou PCR sur liquide articulaire positive.

–  Atteintes cardiaques : la forme principale est un bloc auriculoventriculaire survenant de 4 jours à 7 mois après la piqûre de tique. La sérologie est recommandée dans le sang : ELISA suivie d’un Western blot si elle est positive ou douteuse.

En cas de sérologie positive et de troubles de la conduction ou du rythme, un avis cardiologique est recommandé.

– Atteintes ophtalmologiques : la sérologie est recommandée dans le sang : ELISA suivie d’un Western blot si elle est positive ou douteuse. La sérologie est généralement positive. En cas de doute diagnostique, une sérologie dans le LCS et une PCR dans l’humeur aqueuse sont recommandées, après avis d’un ophtalmologue.

Au stade de formes disséminées tardives

– Acrodermatite chronique atrophiante : un avis neurologique spécialisé en urgence est justifié. La sérologie est recommandée dans le sang : ELISA suivie d’un Western blot si elle est positive ou douteuse. Une sérologie sanguine positive confirme le diagnostic. Une sérologie négative n’est pas en faveur du diagnostic ; un avis dermatologique est recommandé, pouvant conduire à la réalisation d’une biopsie cutanée pour examen histologique et recherche de B. burgdorferi par culture ou PCR.

– Atteintes neurologiques tardives : une prise en charge neurologique est justifiée. Le diagnostic repose sur les données de l’anamnèse, la biologie et l’imagerie. Au plan biologique, la sérologie est recommandée dans le sang : ELISA suivie d’un Western blot si elle est positive ou douteuse. Elle est généralement positive. L’analyse du LCS est fondamentale, montrant une hypercellularité lymphocytaire avec (ou non) une hyperprotéinorachie, sans hypoglycorachie. La positivité de l’index Ac (comparatif sérologie sanguine et dans le LCS) établit le diagnostic. 

Toutefois, un index Ac négatif, c’est-à-dire l’absence de production intrathécale d’Ac, ne suffit pas à éliminer formellement le diagnostic et requiert des examens complémentaires en centre spécialisé.

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